Henri Larcade âme de la Résistance Locale

Le 18 juin 2024, célébrait le 80e anniversaire du débarquement. À cette occasion, en plus de la traditionnelle cérémonie au Monument aux morts, le passage entre la rue de l'Évêché et la rue de Rohan fut nommé Passage Henri larcade, en hommage à ce mirandais qui fut l’âme de la Résistance à Mirande.
 

​​​​​​​HENRI LARCADE, LE MIRANDAIS 


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Henri Larcade naît en 1912 avec des racines familiales gersoises à Mirande et à Saint Arailles. Son père décède peu avant sa naissance et sa mère tient seule un débit de boissons dans la bastide (où elle aussi sera inquiétée par la Gestapo). Il sera moniteur de sport et l’animateur de la section locale de basket-ball.
 
Mobilisé lors de la Seconde Guerre Mondiale, il combat dans le Doubs en 1940 au sein du 7e Régiment de Spahis algériens (il prendra dans la Résistance le pseudo « Lartigue » en souvenir d’un camarade tué sur le front). Interné dans un camp en Suisse, il s’en évade et revient à Mirande ; il échoue à rejoindre l’Afrique du Nord au départ de Port-Vendres pour continuer le combat. Il s’investit alors pleinement dans l’action patriotique : il sera « un Résistant de la première heure ».
 
Intrépide et recherché, il participe, armé, au match de championnat de France de basket à Tarbes devant les autorités militaires allemandes en 1943 sous le maillot de l’USAM.
 
A la Libération, au moment où des tensions exacerbées frappent le territoire national, à Mirande Henri Larcade, fort de son autorité morale, exerce un rôle modérateur majeur qui évite localement les débordements paroxystiques enregistrés ailleurs, « oubliant les injures de certains et le mal que, sciemment, ils ont tenté de lui faire » (Le Gers Libéré, 29 octobre 1944). Un habitant l’avait notamment dénoncé à Vichy pour détention d’armes.
 
En 1948 il épouse celle qui était son agent de liaison durant la Résistance, la mirandaise Solange Dorat. Ils quittent alors Mirande pour la Guyane, où il s’occupe d’affaires commerciales en Amérique du Sud où s’exprime son tempérament d’aventurier. Il décède en 1997 à Matoury où il est inhumé. Une cérémonie in memoriam se tient alors au cimetière de Mirande en présence d’Emma Saucède. Lors de sa visite officielle en 1964 en Guyane, le général de Gaulle, l’homme de l’Appel du 18 juin 1940 devenu président de la République, se fait présenter à la résidence du préfet des Résistants vivant dans ce département d’outre-mer : ils seront deux sur la photo officielle, dont Henri Larcade.

 

HENRI LARCADE, ÂME DE LA RÉSISTANCE LOCALE

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Comme l’a souligné Guy Labédan, historien de la Résistance gersoise et correspondant de l’Institut d’histoire du temps présent aux écrits qui font autorité, l’action d’Henri Larcade recouvre toutes les facettes de l’engagement résistant précoce : la distribution de tracts de Combat et de Libérer et Fédérer, la fourniture de faux papiers aux traqués en partance pour l’Espagne, la cache de postes émetteurs à son domicile (avec les opérateurs radio « Georges » et « Boris »), la recherche de terrains de parachutages puis le maquis.
 
De la fin 1942 à septembre 1943, en vertu d’accords régionaux, il travaille étroitement avec le lieutenant Miler, 2e Dragons d’Auch démobilisé dont le maquis s’est fixé à Ponsampère. Il est son adjoint « Armée Secrète » d’une compagnie sous commandement « Organisation de Résistance de l’Armée » (ORA). Leur amitié perdurera au-delà de cet épisode et permettra le camouflage de réfractaires au STO et la préparation de la phase opérationnelle avec la réception de parachutages après formation des équipes au sol.
 
L’étau allemand se resserre autour de lui par deux fois : le 28 octobre 1943 et un mois plus tard, où il échappe à la Gestapo venue perquisitionner chez lui. Le 14 décembre intervient la chute du maquis de Ponsampère. Il plonge alors dans la clandestinité durant 10 mois sans quitter le secteur et prépare le jour « J ». Deux compagnies maquisardes voient le jour à son initiative, mais il estime que c’est à un officier de métier de prendre la tête du Bataillon de l’Astarac et de l’Arros : c’est le chef d’escadron Soulès qui est désigné tandis qu’il conserve lui-même la responsabilité de la compagnie « Lartigue » (son pseudo) cantonnée vers Saint Christaud. C’est pour faire profiter son supérieur de sa connaissance du terrain qu’il se trouve pris dans l’embuscade de Saint Maur.
 
La Libération le trouve président du Comité cantonal de libération et, transitoirement, adjoint au maire de Mirande. Il aura été l’organisateur incontesté de la Résistance mirandaise pour le mouvement « Combat » et l’Armée Secrète.

 

LA MUNICIPALITÉ MIRANDAISE A LA LIBÉRATION

La municipalité résistante Vignolles avec Henri Larcade.jpg

Le 8 août 1944 (les Allemands sont encore là), l’ordre du jour secret du Comité de Résistance de Mirande décrète : « La prise de Mirande par le maquis est imminente. Dès que l’attaque sera déclenchée, le Comité de Résistance remplacera la municipalité imposée par Vichy et administrera la ville ». Suivent les noms des 13 membres du Comité de Résistance, dont Henri Larcade.
 
Une fois le Gers libéré, le Comité départemental de libération s’adresse à la population : « Patriotes du département, nous allons enfin pouvoir vivre libres. Les hontes, les humiliations de la défaite et de la trahison sont définitivement effacées ».
 
Le conseil municipal ayant été dissous, la Commission spéciale (d’inspiration résistante) chargée d’administrer la commune est officiellement installée le 29 août 1944, dans une relative sérénité, avec à sa tête Emile Vignolle (officier en retraite) et Henri Larcade comme adjoint (il a décliné l’offre du poste de premier magistrat). Elle assurera la transition jusqu’au retour à la légalité républicaine et les élections municipales (quelque peu troublées, des coups de feu ayant été tirés) d’avril-mai 1945 où Elie Duffort, personnalité consensuelle, membre du Comité local de Libération (et dont le fils résistant faisait partie du bataillon Soulès) est élu maire.
 
En fuite à la Libération, Laval sera arrêté, condamné à mort pour haute trahison et complot contre la sûreté intérieure de l’État par la Haute Cour de justice puis fusillé ; Pétain quant à lui, sera jugé pour intelligence avec l’ennemi et haute trahison par la même cour et condamné à mort, peine commuée en prison à perpétuité à cause de son grand âge.

 
Textes et Photos par Henri CAHIOL